Récit de notre traversée Alsace – Méditerranée

 

Notre projet est né d’une passion commune pour le vélo entre un Québécois et un Français. 1000 kms entre le Nord-Est de la France à la méditerranée en traversant les plus belles montagnes de l’Est de la France. Le but n’est pas d’étaler notre vie mais de vous faire partager ces quelques moments de bonheur et d’inspirer les voyageurs en recherche de parcours. Tout le tracé est disponible sur demande. Accrochez-vous, ça démarre sur les chapeaux de roue.

 

Jour1 : Burnhaupt – Neufchatel, 125 km, 20 km/h

 

Ca commence bien ! Eau, flotte, flaques, pluie, giclures, éclaboussures, mouillés, trempés, frigorifiés… 1/2  heure de pluie légère, puis 7 heures de déluge, les roues dans une flaque infinie, l’eau qui ruisselle et qui pénètre partout. Oui, c’est dur de déballer ses sacs soigneusement préparés et d’en sortir des vêtements, des livres, des passeports imbibés d’eau.

On a donc fait aujourd’hui 125 km dont 7 à travers Neuchâtel pour trouver l’auberge de jeunesse. Le profil de l’étape : /\/\/\ 3 montées à 1200m d’altitude depuis des vallées. On a donc coupé à travers 3 combes du Jura Suisse, une belle ligne droite sur la carte ! Les paysages verdoyants avaient l’air d’être très beaux, mais la plupart du temps limités par une visibilité à 50m.

L’auberge est assez loin du centre, et on s’est tapé encore quelques kilomètres à pied pour aller manger (Mc Do, seul ouvert et abordable !). Ah oui, à midi on s’est fait une bonne bouffe dans un petit village, histoire de se sécher un peu et surtout se réchauffer après une longue descente sous la pluie battante.

 

Jour 2 : Neuchâtel – Genève, 127 km, 25 km/h

 

Départ de l’AJ après avoir bien rangé nos affaires dans des sachets de plastique. Sage précaution car dès qu’on met le nez dehors, il se met à pleuvoir. Mais pas suffisamment pour mettre l’imperméable. D’ailleurs ça s’arrête bientôt et on se promène tranquillement dans le vignoble de Neuchâtel, empruntant tantôt des grosses routes nationales désertes, tantôt des petites routes à flanc de coteaux. Le paysage est agréable. Entre 12h et 14h, le soleil nous fait même l’honneur de sa présence, ça fait du bien après la journée d’hier. Arrivés à l’extrême sud du lac de Neuchâtel, on trouve un camping au bord de l’eau, à Yverdon pour acheter quelques victuailles et déguster le tout au nez des canards. La traversée « inter-lac » se fait très vite, le vent dans le dos aidant, on roule souvent à 35 – 40 km/h. C’est plat, mais pas mal vallonné tout de même. Et voilà déjà le Lac Léman, qu’on atteint à hauteur de Nyon. De là, une piste cyclable nous mène très agréablement et rapidement à Genève. Un jeune allemand qui avait dormi à l’AJ de Neuchâtel a fait la moitié du parcours avec nous. Malheureusement il crève à quelques km de l’arrivée et sa réparation est très longue. Tellement que la pluie a le temps de nous rincer encore une fois. Mais c’est surtout avant d’arriver à Nyon qu’une bonne averse (orage) nous a sérieusement mouillés, surtout par la route détrempée et l’eau projetée des roues. N’importe qui aillant roulé derrière un cycliste sans garde-boue saura de quoi je parle. A Genève, l’AJ est moderne et paraît plus confortable qu’à Neuchâtel. C’est presque un hôtel ! A peine douchés, Marc André nous emmène visiter Genève, d’abord pour se trouver qq chose d’abordable à manger (difficile), puis pour faire qq km supplémentaires (à pied) dans le vieux Genève. On a mangé dans une taverne autour d’une bonne bière. Puis déambulage dans la ville avec les festivités de l’an 2000 (grosse foire très populaire et populeuse) où on se laisse tenter par une dernière glace. LA nuit est bonne et réparatrice pour nos muscles déjà bien mis à contribution.

 

Jour 3 : Genève – Annecy – Aix-les-Bains, 105 km, 23 km/h

 

Départ de Genève sous le soleil (Yeah !) mais sans petit déjeuner. Heureusement il nous reste de la brioche d’hier midi ! On met une bonne demi-heure à sortir de Genève et encore une à contourner le mont Salève pour trouver une belle petite route qui s’élève sur un plateau campagnard. Vers 10h, on trouve enfin une épicerie où on se fait un bon petit déjeuner. On continue à s’élever à 800m, nos jambes tournent bien, on progresse à une allure impressionnante, avec nos gros sacs qui en imposent. On redescend vers Cruseilles puis Annecy où on entre par … l’autoroute ! (Pas d’autre possibilité !) On rejoint Annecy le Vieux où on retrouve Mélanie ma cousine, elle nous invite à manger un bon casse-croûte. Le soleil donne bien et on s’attarde dans la petite boutique de Mélanie qui nous paye le café. Il faut prendre le temps de vivre lorsque c’est agréable. On repart par le lac d’Annecy dont l’eau est très belle, vers 3h. La route est pénible car la circulation est particulièrement dense. On prend ensuite une petite route qui s’élève dans les monts du Semnoz. On laisse tomber le détour par le crêt de Chatillon (1700m) car le temps est passé vite et on a encore de la mécanique à faire sur les vélos ce soir. Mon moyeu avant a besoin d’un graissage et les patins de frein de Marc-André n’ont pas supporté les premiers jours sous la pluie. D’ailleurs les vélos sont encore recouverts du sable accumulé sur les routes suisses. On arrive rapidement au col à 900m, aidé par un fort vent dans le dos. Il ne nous reste plus qu’à se laisser descendre jusqu’à Aix-les-Bains. L’AJ est proche du port, c’est très joli. Après notre mécanique, on reprend les vélos pour aller se baigner . Heureusement, car c’est loin ! L’eau est bonne, mais c’est presque impossible de nager à moins de 100m du bord tellement l’eau est peu profonde. On s’en va ensuite vers le centre d’Aix, encore bien loin et on trouve ensuite bonne brasserie par cher où on mange très bien. On rentre en vélo dans la nuit noire et après une douche, je me consacre au récit de la journée ce que je fais présentement. Mais il est bien tard et je vais me coucher avec 2 espagnols dans la chambre, j’espère qu’ils ne ronflent pas !

 

Jour 4 : Aix-les-Bains – Grenoble, 95 km, 17.5 km/h

 

Etape très physique dans la Chartreuse. De Aix-les-Bains à Chambéry, on longe le lac du Bourget, puis un col relativement raide mais heureusement court nous mène à Chambéry par la motte Servolex. Comme rien ne nous séduit là, on attaque la longue et dure ascension du col du Granier, ce qui nous occupe pendant plus d’une heure. Une petite pause au col, et on redescend sur St Pierre d’Entremont où on trouve enfin de quoi se restaurer honorablement. En l’occurrence de bonnes galettes de sarrasin. Il est 15h lorsqu’on repart, le ciel encombré de quelques nuages qu’on trouve menaçants à tord. On attaque la montée du col du Cucheron qui nous fait souffrir à cause de la chaleur lourde. On transpire à grosses gouttes surtout à cause du vent qui progresse à la même vitesse que nous. Marc-André crève au sommet, histoire qu’on souffle un peu. On redescend bien bas à St Pierre de Chartreuse avant d’attaquer le dur col de Port, 1326m. On le monte presque uniquement en danseuse, parfois à vive allure grâce au vent qui nous pousse cette fois-ci. Mais c’est dur quand même, à cause de nos bagages. On dégringole ensuite jusqu’à St Egrève, à côté de Grenoble. La route n’est pas bien bonne et Marc-André en arrache avec sa main foulée 2 jours avant le départ ! On magasine avant d’aller festoyer au Formule 1.

 

Jour 5 : Grenoble – Die, 107 km, 19,6 km/h

 

Belle étape à travers le Vercors. Au départ de l’hôtel, on rencontre un cycliste qui nous guide jusqu’à Sassenage. De là une longue montés sans grande difficulté nous amène à 1000m d’altitude à Lans-en-Vercors, sur le plateau. On rejoint ensuite Villard de Lans un peu plus haut, ville bondée de touristes. Il est 11h30, mais le temps pour moi de changer mes patins de frein et pour Marc-André de faire le marché, il est temps d’ingurgiter notre ration de produits du terroir, ie un bon pâté de Sanssonet et un morceau de tomme du Vercors. Ca nous met du cœur à l’ouvrage pour la suite qui va nous réserver des surprises. En effet on s’engage dans les gorges de la Bourne sur une route creusée dans le roc sur plusieurs dizaines de km. Nos yeux ont du mal à le croire et on prend en masse de photos tellement ce lieu est impressionnant. On remonte ensuite dans une petite vallée au paysage typiquement « Vercors ». On passe dans La-Chapelle-en-Vercors, puis un faux plat montant nous emmène à Rousset où commence l’ascension du col de Rousset, le plus haut de la journée.

Mais ce col s’avère très facile à franchir, la pente étant très raisonnable, et le vent aidant un peu. La route est tout en longueurs. Au « col », un tunnel franchit la dernière masse montagneuse à 1300m, et au bout du tunnel, le paysage est en effet très différent, comme nous l’annonçait un prospectus. La végétation devient de type aride, plus typique de la Provence. Mais c’est surtout au terme de 15 km de descente en longues épingles à cheveux que le choc du dépaysement est le plus fort : on débouche dans un champ de lavande, entre des rangés de Cyprès odorants… Des bouffées de chaleur nous assaillent, le soleil devient brûlant. C’est vrai qu’on vient de perdre 1000m d’altitude. Un dernier petit col nous permet de rejoindre Die, où on fait de bonnes provisions à l’épicerie locale. On monte ensuite avec tout notre barda brinquebalant jusqu’au Gîte d’Etape qui nous attend à 4 km de là, perdu en pleine campagne. Le paysage est extraordinaire, le calme également. On se fait un excellent repas de pâtes à la sauce « Marc-André ». Le gîte est énorme et nous avons vraiment de la place. Seule une 3ème personne vient se joindre à nous dans la soirée.

 

Jour 6 : Die – Vaison-la-Romaine, 128 km, traversée de la Drôme Provençale.

 

Après une bonne nuit dans ce gîte exceptionnel, on essaye de se lever tôt (6h) pour partir à la fraîche, car la journée promet d’être chaude. On se fait un petit déjeuner frugal (500g de céréales), on ramasse notre barda, et on sort habillés comme en hiver. En effet il fait 10°C dehors, le soleil apparaît lentement dans une légère brume matinale. Les sommets s’illuminent un à un et on roule à bonne allure sur la nationale déserte qui rejoint une petite route qui monte au col du Prémol. Le paysage est magnifique, paradisiaque, une petite route comme neuve qui serpente agréablement au pied du claps, sorte d’éboulis dans les falaises, avec une végétation exceptionnelle. Le col se monte bien malgré presque 1000m. La chaleur est douce, pour l’instant.

Une longue descente nous mène à La Motte Chalancon puis Rémuzat. On y fait nos courses pour le midi et on emporte le tout dans la montée du col de Soubeyrant, qu’on monte au 1/3 avant de s’arrêter complètement assommés par la chaleur sèche et le soleil de plomb. Le ciel est bleu intense et aucun nuage n’apparaît à l’horizon. On se trouve un coin à l’ombre de tilleuls et on y mange tranquillement avec quelques mouches. A cause de la chaleur, on prolonge notre pause jusqu’à 14h15, soit 2h30 d’arrêt. C’est pour ça qu’on est parti tôt ce matin. Au moment de repartir, on rencontre un belge qui voyage comme nous mais avec une tente dans son sac à dos. Courageux mais très inconfortable ! Le reste de la montée est torride, le bitume fond sous les roues, l’ombre est introuvable. Au col, le paysage est extraordinaire, on voit de mieux en mieux le Ventoux, comme un objectif pour nous puisqu’on roule dans sa direction depuis 6 jours. C’est là aussi que va nous rejoindre ma blonde Marie-France. La descente de ce col est très agréable, la chaleur est plus supportable, et nous arrivons dans des champs de lavande au parfum puissant. Le paysage est merveilleux, mon vélo et mes jambes vont bien, je suis heureux. Après avoir passé la rivière « l’ennuye », on remonte un 3ème col (d’Ey) pas très clair sur la carte, mais assez haut quand même. Je suis en forme et je prend les devants. Mais Marc-André crève, toujours pour la même raison. Le poids de nos embarcations met les jantes à dure épreuve, et les chambres à air en payent le prix. On bricole un nouveau fond de jante avec du ruban adhésif, à la Green Red ! Le soleil est assommant et je suis obligé de me tartiner de crème solaire. Ce col nous rapproche encore du Ventoux qui paraît de plus en plus haut, majestueux. On se fait une descente infernale vers Buis-les-Barronnies où mon bonheur et stoppé net par une foule de touristes des plus désagréables. Dur retour à la civilisation. L’office du tourisme nous annonce que tout est complet. Après une demi-heure, on réussi quand même à trouver un gîte d’étape, génial ! On fait la route jusqu’à Vaison-la-Romaine comme des fous car la température flirte avec les 35°C. On y mange rapidement une pizza. Il nous reste encore 20 km à faire avant la nuit pour rejoindre le gîte très accueillant, à Gigondas, sous les dentelles de Montmirail.

 

Jour 7 : Ascension du Mont Ventoux

 

Le grand jour est arrivé ! Sur les traces de nos héros du Tour de France, nous allons nous « faire » le géant de Provence. Il nous faut d’abord retourner à Vaison-la-Romaine, où on refait nos réserves énergétiques. Encore 15 km pour rejoindre Malaucène, et on peut attaquer les 20 km de la monté finale. Parmi les 3 montées possibles, nous avons choisi la 2ème plus dur, de manière à profiter au mieux du paysage en fonction du soleil. La montée est sérieuse mais régulière, plus ou moins à couvert, dans une forêt de pins. A 1000m d’altitude, le paysage est déjà assez aérien. On peut observer les Barronnies qui nous ont tant ravies hier. La montée continue, à un bon rythme. Puis tout d’un coup on sort de la forêt et on se retrouve au pied d’un promontoire de roche blanche. Le sommet se dessine nettement devant nous, et la route est de plus en plus recouverte de cyclistes de tous poils. Encore deux épingles à cheveux et voilà le sommet, avec son célèbre panneau 1909m. C’est un haut lieu touristique malheureusement, et on manque de se faire écraser par un bus avant d’atteindre le sommet ! On profite du panorama mérité et de l’absence de vent, mais il faut se résoudre à redescendre. On emprunte la route du versant sud qui nous rappelle les belles images du tour de France. La descente est infernale, mais très grisante ! Après St-Estève, on fait une pause déjeuner à Bédoin. Puis on continue la descente à travers la Provence aride du mois de Juillet. Après Beaumes-de Venise, charmant petit village, la température devient insupportable et on manque de s’éffondrer avant d’avoir rejoint notre point de départ à Gigondas.

La journée fut très belle, et demain on se permet un jour de repos.

 

Jour 9 : Manosque – La-Pallud-sur-Verdon, 110 km

 

Ayant profité de notre journée sans vélo, on a rejoint Manosque en voiture, à travers la Montagne de Lure. Nous sommes maintenant 3, et nous devons nous organiser différemment. La direction suivie n’est plus le Sud, puisque nous avons décidé de nous diriger vers Nice, vers l’Est. Le début de la journée est tranquille et nous mène à Gréoux puis à Moustier-Sainte-Marie, l’un des plus beaux villages de France paraît-il. Malheureusement, c’est bondé de touristes motorisés et on ne peux s’y arrêter ! Tant pis, on continue vers le Lac de Sainte Croix, un petit détour mais on a bien envie de piquer un tête dans l’eau rafraichissante ! Le temps de sortir de l’eau et un orage nous surprend ! Mais le vent chasse ces nuages et nous évitons d’être trop mouillés. Nous entrons dans les gorges du Verdon où une petite route très fréquentée et polluée nous fait remonter à plus de 1000m. Nous rejoignons La-Pallud-sur-Verdon où nous installons notre tente. Il fait frais à cette altitude et on se hâte de manger. Un peu de pluie vient perturber notre quiétude, mais de toute façon le sommeil nous rattrape.

 

Jour 10 : Verdon – Grasse, 120 km.

 

5h30, je suis levé pour assister le levé du soleil. J’ai hâte de remonter sur le vélo pour cette dernière étape. On prend tout de même le temps de faire sécher la tente et manger correctement. Une jolie route encaissée dans la montagne nous mène le long du Canyon du Verdon jusqu’à Rougeon. Puis on fait un beau détour par Comb-sur-Artubie pour éviter la Route Napoléon, domaine réservé des véhicules polluants. Des successions de montées et descentes nous révèlent des paysages pittoresques. Nous rejoignons Le Logis du Pin par un col tout de même assez long, puis nous traversons le route pour emprunter la combe de Valderoure et Thorenc. Après une bonne pause déjeuner, on descend sur une magnifique route accrochée à la falaise qui rejoint Gréolière. On descend au fond du vallon pour remonter à Cipière puis Gourdon, encore un des plus beaux villages de France, qui domine les gorges du Verdon et … oh, la mer ! Toute la côte d’azur se dessine sous nos yeux.

Une dernière descente pour arriver à Grasse, terminus de ce bien beau voyage.

 

Le vélo est vraiment le meilleur moyen de visiter la France.